Le Vernet,
C’est l’automne en Ardèche et Gaston Jambois, un septuagénaire moustachu à l’allure un peu bûcheronne, un peu hippie, nous récupère à Lablachère avec sa camionnette. Direction le Vernet, petit hameau de la commune de Saint-André-Lachamp, en Sud Ardèche, où il vit avec Arlette Menu depuis une quarantaine d’années. Situé au cœur d’une châtaigneraie, le hameau a été racheté au fil des ans via une SCI que le couple a créée pour en faire un lieu de vivre-ensemble, d’échange, de partage de savoirs-faire manuels et paysans. Gaston et Arlette sont aujourd’hui retraités. Gaston était artisan-charpentier depuis son installation en Ardèche il y a 40 ans, et Arlette éducatrice spécialisée. Ensemble, ils ont créé l’association la Genette, qui rassemble les habitants du hameau du Vernet, Michèle et Martine, Christiane et Vincent, Loïc, artisan-murailler, et Adrien, un peu tous adeptes de bricolage, de mécanique, de cuisine et de jardinage. L’association a pour but de valoriser la production agricole du hameau, et les savoir-faire manuels, artisanaux, culturels et paysans du coin, en prenant soin de l’environnement et des humains qui s’y trouvent. Ils ont également créé le gîte paysan l’aulne d’Alune.
Faire société autrement, vieillir autrement
Bien sûr, Gaston, Arlette et leurs voisins ne sont pas des paysans agriculteurs puisqu’ils sont retraités. Ils ne vivent pas de leur production de châtaigne, qu’ils s’obstinent tout de même à maintenir, en travaillant chaque année avec acharnement pour sortir de la confiture et de la farine. Mais découvrir l’existence que ces personnes retraitées mènent dans un espace difficile et escarpé comme l’Ardèche, m’a fascinée. Une vie très remplie, liée à l’autre, habitée par une soif d’apprendre et de découverte immense. J’y ai côtoyé une richesse humaine et un rythme de vie que je ne m’étais pas autorisée à imaginer dans mon propre quotidien.
Ce lieu m’a aussi ramenée à la nécessité d’un ancrage local quand on fait le choix de vivre en zone rurale. J’y ai vu le maintien d’une culture de l’entraide, d’une économie de proximité qui passe par un tas de projets permettant à chacun d’habiter sereinement et durablement ces espaces. Des espaces ruraux qui paraissent souvent isolés et enclavés pour ceux qui n’y vivent pas. Moi qui viens de la grande ville, l’isolement est une crainte liée à mon choix d’une vie plus rurale. Les clichés ont la vie dure, car c’est tout l’inverse que j’ai trouvé, au Vernet.