Saisonniers

Ils découvrent le travail au milieu des champs

Par Benjamin Ruillier – 16/09/2024

En entrant, on pourrait croire à un terrain de camping fait d’un alignement de tentes désordonnées. Mais les bottes crottées de boue et les vêtements de travail qui sèchent sur des fils ou des guidons de vélos rappellent qu’ici on ne vient pas pour flâner, ou seulement à l’heure de la débauche. À La Ménitré, commune ligérienne de l’est du Maine-et-Loire, L’EARL Deschamps et la SCEA Les Sablons embauchent chacun une petite vingtaine de saisonniers pour la castration des maïs. Tous mineurs, ils découvrent souvent le monde professionnel, ses contraintes, ses atouts et logent sur les terrains mis à disposition par les exploitants. Rencontres au pied des tentes avec ces petites mains qui parcourent les champs dans la chaleur du début d’août.

Je viens de Tours, et c’est ma première expérience de travail. Sur certains champs c’est très long, ça paraît interminable, mais avec l’expérience ça va. On a fait des grosses journées, de huit heures à peu près, ça permet de progresser d’un coup. Et vivre en camp avec les autres jeunes : ça apprend à être autonome, on doit se débrouiller. Tu apprends à travailler et tu comprends les journées de tes parents. Je me dis que si je dois partir de chez moi à 18 ans, je pourrai gérer.

C’est ma première expérience, mais j’ai le sentiment que pour le moment on n’a pas trop travaillé. On a fait trois matinées. Des fois j’ai un peu mal au dos mais ça va. Avec l’argent, je vais peut-être m’acheter un scooter. Je vais travailler dans une pizzeria quand j’aurais 16 ans, donc ça me permettra d’y aller plus facilement.

C’est ma deuxième année ici. Au début c’était bien, les autres étaient nouveaux, ils étaient plus lents mais maintenant ils m’ont rattrapé ! J’avais cherché à travailler dans les pommes ou dans une maison de retraite, j’ai envoyé des CV mais je n’ai eu aucune réponse, donc je ne vais faire que ça. J’aimerais bien être hôtesse de l’air ou psychologue. J’essaie de garder cet argent pour mon permis ou pour m’acheter une voiture.

Mon pote Ewen m’a parlé de ce travail, et puis j’ai appelé, j’ai fixé le rendez-vous avec le patron et puis ça s’est fait comme ça. J’avais fait un jour en vigne avant seulement. Le maïs c’est pas mal, on ne travaille pas énormément pour l’instant, on n’a fait que trois matinées donc ça ressemble plus à des vacances qu’à du travail mais là ça va venir.

J’appréhendais de faire ce travail, de ne pas trop savoir comment faire. Au début, j’étais un peu lente… Maintenant aussi en fait ! Je ne suis pas très grande donc les bras, les trapèzes ça travaille et puis le maïs un peu haut, ça peut griffer le visage, mais ça va. C’était pas prévu que je vienne travailler ici, j’ai remplacé quelqu’un et finalement je reste.

J’avais travaillé en boulangerie avec mes parents, mais c’est la première fois que je signe un contrat. Je veux être pilote de chasse dans l’armée de l’air et avec ce salaire, j’aimerais acheter un simulateur de vol pour m’entraîner chez moi et avoir déjà un peu d’expérience. Normalement, avec la paie, à la fin de l’été ça devrait être bon.

On cherchait à travailler et on s’est dit “le maïs : pourquoi pas”. J’ai trouvé l’exploitation sur Internet et je suis venue jusque dans le Maine-et-Loire parce qu’en Mayenne où j’habite il n’y a pas trop de maïs. Au début c’était un peu dur parce que c’est la première fois qu’on travaille mais après on s’y fait.

C’est la première année que je fais les maïs. C’est moins compliqué que les échalotes que j’avais fait l’an dernier pas loin. Les échalotes, tu es à quatre pattes ou assis et les rangs paraissent long. Là c’est strict mais on peut parler quand même donc ça va et on a un bon groupe qui travaille bien. Dans les échalotes on devait payer un camping à côté pour loger. Ici, ils te donnent un endroit où manger avec des plaques de cuisson et il y a des douches. On va gagner environ 500-600 euros, je vais essayer de garder 150 euros pour les vacances et mettre de côté le reste.

C’est plutôt ma pote qui m’a motivée, moi j’avais pas trop envie. J’ai un peu mal au dos mais ça va. Le matin je me lève un peu en me disant que ça m’embête mais le fait de gagner de l’argent, ça motive. Et puis l’après-midi on fait des jeux, on nettoie les vêtements, on sociabilise.

J’avais déjà travaillé deux semaines ici l’an dernier. En soit le travail est assez simple, c’est juste répétitif et mental. Mais cette année, on fait plus d’heures en moins de jour. Le travail, je connais un peu parce que je suis en bac pro donc depuis la seconde j’ai des stages. Je connais déjà un peu le cadre de l’entreprise et j’ai déjà eu des paies.

Avec deux autres potes on a proposé notre candidature sur un site de recrutement pour le maïs avec nos lettres de motivation et on a été pris. J’ai écrit que j’avais envie d’une première expérience professionnelle. Ça m’intéressait aussi de découvrir le monde du travail, comment on fait un contrat. Ici, on doit s’organiser. On a une tente avec nos valises et à manger et une autre grande dans laquelle on dort tous les trois. Les soirées c’est un peu toujours pareil : manger, vaisselle, douche et on va se coucher pas trop tard parce qu’on recommence en général à 8h et on fait de grosses journées. La saison a été décalée et tout le travail a été condensé, ça fait cinq jours qu’on fait huit heures par jour. La première journée ça m’a paru long, j’avais l’impression d’avoir fait deux journées mais le fait de faire des grosses journées, ça fait plus d’argent.